Lettre de rupture conventionnelle
« Lettre de rupture conventionnelle » : de quoi parle-t-on : d’une lettre de proposition (ou demande) de rupture conventionnelle, ou du texte de la convention de rupture ? Qu’est-ce qui est obligatoire, recommandé, ou à éviter ? Dans quel cas y-a-t-il intérêt pour le salarié à écrire une lettre de demande de rupture conventionnelle ? Quels sont les risques de cette lettre pour le salarié et pour l’employeur ? Pourquoi l’employeur doit réfléchir à deux fois avant d’écrire une lettre de proposition de rupture conventionnelle ?
Avertissement préalable aux lecteurs : Cet article ne concerne que les salariés et les employeurs dont la relation relève du code du travail. Depuis le 1er janvier 2020, une rupture conventionnelle a été rendue possible dans la fonction publique. Et la procédure définie pour la fonction publique diffère de celle régissant la rupture conventionnelle des salariés. Pour la fonction publique, il convient donc de se référer aux articles qui lui sont consacrés.
« Lettre de rupture conventionnelle » : de quoi parle-t-on ?
La lettre de proposition de rupture conventionnelle
L’employeur et le salarié sont l’un et l’autre parfaitement en droit de proposer une rupture conventionnelle à l’autre partie. Mais doivent-ils le faire par écrit pour une rupture conventionnelle individuelle ?
Concernant une rupture conventionnelle dans le cadre d’un accord collectif, il convient de se référer à ce qui est prévu dans cet accord et non à ce que nous exposons ci-dessous.
Aucun caractère obligatoire
La lettre de proposition de rupture conventionnelle n’a aucun caractère obligatoire. En effet, elle n’est nullement prévue dans la procédure légale. En fait, il ne s’agit que d’une mesure que certains conseillent à l’employeur ou au salarié. Car elle identifie lequel de l’employeur ou du salarié a eu l’initiative de la rupture conventionnelle… du moins en apparence.
Cependant, malgré une lettre de demande de rupture conventionnelle signée par le salarié, il arrive qu’en réalité ce soit l’employeur qui a eu l’initiative. Il est, en effet, assez courant que l’employeur, demande au salarié d’écrire (ou de signer) une lettre de demande de rupture conventionnelle, pour que le salarié semble être à l’initiative de la rupture.
Pourquoi des employeurs à l’initiative de la proposition de rupture conventionnelle veulent-ils que le salarié apparaisse comme le demandeur ?
Parce qu’en faisant apparaître le salarié comme le demandeur, son consentement semble évident. Par conséquent, cela sécurise l’homologation par l’administration du travail. Et surtout cela rend beaucoup plus difficile une contestation ultérieure de la validité de la rupture conventionnelle devant les prud’hommes par le salarié.
La convention de rupture
Après qu’ait eu lieu au moins un entretien entre l’employeur et le salarié concerné (avec éventuellement une assistance [1]) l’accord et ses conditions ainsi qu’un certain nombre de renseignements doivent être écrit sur l’imprimé Cerfa N° 14598*01, dont l’utilisation est absolument obligatoire.
NB : Pour un salarié protégé (délégué syndical ou élu du personnel), le formulaire qui doit être utilisé est le Cerfa N° 14599*01. Et une autorisation remplace l’homologation.
La lettre de rupture conventionnelle, plus communément appelée « convention de rupture », revêt donc la forme d’un imprimé Cerfa. L’une des parties (presque toujours l’employeur) la remplie et les deux la signent. Ce document doit être attentivement et correctement rempli pour que la rupture conventionnelle soit homologuée par l’administration du travail. L’homologation par l’administration est un contrôle de conformité à la loi, ayant pour but de garantir la liberté du consentement.
La convention de rupture présente l’intérêt de sécuriser la rupture tant pour l’employeur que pour le salarié concerné. En effet, elle permet de vérifier que tout est OK. D’abord, au moins un entretien a-t-il bien eu lieu ? Ensuite,le délai de rétractation a-t-il été respecté ? Et le calcul de l’indemnité de rupture conventionnelle respecte-t-il bien au moins le minimum légal avec un calcul correct ? Enfin, chacune des parties a-t-elle bien lu et approuvé les termes de l’accord ?
Le succès de la rupture conventionnelle avec sa lettre de rupture sur un formulaire est à l’origine de deux innovations. En effet, les ordonnances Macron de septembre 2017 ont créé : la rupture conventionnelle collective et les imprimés Cerfa utilisables comme lettres de licenciementt.
Intérêts et risques de la lettre de proposition de rupture conventionnelle
Pourquoi l’employeur doit réfléchir à deux fois avant d’écrire une lettre de proposition de rupture conventionnelle ?
Si l’employeur écrit une lettre de proposition de rupture conventionnelle à un de ses salariés, la négociation de rupture peut ne pas aboutir. Ensuite, s’il licencie le salarié assez rapidement, ce dernier pourra se servir de la lettre de proposition de rupture conventionnelle pour montrer l’intention de l’employeur de se débarrasser de lui avant d’avoir un motif de licenciement. En fait, cela pourrait même contribuer à étayer une argument sur un harcèlement.
Si toutefois l’employeur souhaite écrire une lettre de proposition de rupture conventionnelle, il devra se contenter de la proposer. En aucun cas il ne devra menacer le salarié d’un licenciement pour le cas où celui-ci refuserait la rupture conventionnelle. Car le salarié après l‘avoir signé pourrait la conteste devant les prud’hommes. Ce serait un élément contribuant à ce que la juridiction prud’homale juge qu’il y a eu absence de libre consentement du salarié et requalifie la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Lorsque l’employeur répond par écrit à une demande de rupture conventionnelle du salarié, il aura intérêt à inviter le salarié à un entretien ou « premier entretien » en vue de l’éventuelle rupture conventionnelle. Il en sera de même lorsque l’employeur écrit une lettre de proposition de rupture. En outre, l’employeur aura aussi tout intérêt à préciser que le salarié peut se faire assister …. Ce faisant, l’employeur se constituera des éléments de preuve du respect du libre consentement du salarié.
Pourquoi le salarié doit réfléchir à deux fois avant d’écrire une lettre de demande de rupture ?
Si le salarié écrit et/ou signe une lettre de demande de rupture conventionnelle cela rendrait beaucoup plus difficile pour lui de contester ultérieurement la validité de la rupture conventionnelle devant les prud’hommes. Il pourra, en effet, difficilement prétendre que son consentement n’était pas réel. Or c’est ce qu’il faudrait plaider pour demander une annulation devant le conseil de prud’hommes. Ce qui entraînerait la requalification de la rupture en licenciement sans cause réelle et sérieuse… Et donnerait droit à des indemnités prud’homales.
A priori, le salarié n’a pas forcément envie de contester son consentement à la rupture conventionnelle. Mais il y a un autre risque, celui des suites d’un non aboutissement de la rupture conventionnelle. En effet, si la rupture conventionnelle n’aboutit pas et que l’employeur licencie le salarié pour faute grave sans indemnités, il pourra se servir de la lettre écrite par le salarié pour démontrer sa volonté de quitter l’entreprise et crédibiliser la réalité d’un comportement fautif (pour se faire licencier).
Dans quels cas le salarié peut-il trouver un intérêt à écrire et/ou signer une lettre de demande de rupture conventionnelle ?
1er cas : l’impossibilité de le faire oralement à la bonne personne
Dans certaines entreprises, il peut être difficile pour le salarié de parler à son employeur, au DRH, ou à un/e RRH. Le responsable hiérarchique n’est pas toujours un interlocuteur valable, car d’une part il n’est généralement pas le décideur, d’autre part il peut avoir une position personnelle qui ne serait pas celle de la direction. Dans certains cas, il pourra même court-circuiter la demande du salarié. Le mieux est donc un contact direct avec (selon la dimension de l’entreprise) l’employeur, le/la DRH, ou un/e RRH, ou à défaut de pouvoir le faire oralement par une lettre de demande de rupture conventionnelle. Immédiatement après, le salarié aura intérêt à en parler à son supérieur hiérarchique pour éviter de le vexer.
2ème cas : lorsque l’employeur le demande et qu’il n’y a aucune raison de refuser
Comme nous l’avons dit, l’employeur demande parfois au salarié de faire une lettre de demande de rupture conventionnelle. Si les conditions de la rupture sont correctes et que le salarié n’a aucunement l’intention de contester ultérieurement la rupture, il peut accepter de faire ou signer la lettre demandée par l’employeur pour le rassurer et en terminer.
Dans les autres cas :
Pour les raisons inverses à celles de l’employeur, dans les autres cas le salarié n’a aucun intérêt à écrire une lettre de demande de rupture conventionnelle à son employeur.
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Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon-Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME). Aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.
[1] le salarié peut se faire assister par une personne choisie par elle, au sein du personnel de l’entreprise, ou, s’il n’y a pas d’institution représentative du personnel dans l’entreprise, par un conseiller du salarié choisi sur une liste dressée par le préfet consultable à l’inspection du travail et dans les mairies. Le salarié doit informer l’employeur avant l’entretien, s’il se fait assister.
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