Signature sous forte pression de l’employeur

Signature s'une rupture conventionnelle sous forte pression de l’employeur - Jurisprudence de la Cour de cassationLa pression exercée par un employeur pour obtenir la signature d’une rupture conventionnelle par un salarié, allant jusqu’à l’engagement d’une procédure de licenciement pour faute grave avec mise à pied conservatoire, concomitamment à la proposition et à la signature d’une rupture conventionnelle justifie de constater un vice du consentement. Le constat des faits montrant l’existence du vice du consentement relève de l’appréciation souveraine des juges du fond. Jurisprudence de la Cour de cassation.

Une rupture conventionnelle sous forte pression de l’employeur

Un salarié a été engagé en avril 2008 par la société Roctool comme directeur industriel à temps partiel. Deux ans plus tard, l’employeur a proposé à son salarié une rupture conventionnelle et l’a convoqué à un entretien fixé au 28 juillet 2010 pour finaliser la rupture conventionnelle.

A l’issue de cette réunion aucune convention n’a été signée.

Concomitamment, le salarié a reçu des lettres d’avertissement puis une lettre recommandée du 12 août 2010 le convoquant à un entretien préalable en vue de son licenciement pour faute grave.

Ce même 12 août 2010, le salarié et l’employeur ont signé une convention de rupture conventionnelle fixant la fin de la relation contractuelle au 21 septembre 2010. Le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle fixé par la convention était inférieur de moitié à celle envisagée dans le cadre des premiers échanges sur les conditions de la rupture conventionnelle.

Le contentieux prud’homal : validité ou nullité de la rupture conventionnelle

Après la rupture du contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud’homale pour faire juger qu’il avait signé la rupture conventionnelle sous la contrainte et faire requalifier cette rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L’arrêt de la cour d’appel

La Cour d’appel de Chambéry a relevé qu’avant la signature de la rupture conventionnelle, l’employeur avait adressé au salarié plusieurs courriers de mise en demeure de reprendre son poste et pour lui refuser de prendre ses congés en l’absence de demande précise et préalable.

La Cour d’appel a aussi constaté que l’employeur avait mis à pied à titre conservatoire et convoqué le salarié à un entretien préalable à son licenciement. Ainsi, l’employeur avait mis en œuvre  son pouvoir disciplinaire avant que soit signée la convention de rupture fixant l’indemnité de de rupture conventionnelle réduite par rapport à ce qui avait été initialement envisagé.

Sur la base de ce constat, la Cour d’appel a invalidé l’accord de rupture conventionnelle du 12 août 2010  et requalifié la rupture en un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Par suite, elle a condamné l’employeur à payer au salarié diverses sommes à ce titre (arrêt de la Cour d’appel de Chambéry, 16 janvier 2014).

Le pourvoi de l’employeur

L’employeur a formé un pourvoi en cassation en affirmant :

-que le seul exercice par l’employeur de son pouvoir disciplinaire, créant un climat conflictuel, avant la signature d’une rupture amiable, n’affecte pas en lui-même la validité de la convention de rupture conventionnelle ;

-que le consentement du salarié d’opter pour une rupture conventionnelle ne se trouve vicié que s’il est établi que l’employeur a usé de son pouvoir disciplinaire pour inciter le salarié à faire le choix d’une rupture amiable.

Or, selon l’employeur, la cour d’appel n’a à aucun moment constaté l’exercice abusif par l’employeur de son pouvoir disciplinaire, ou l’existence de manœuvres ou menaces pour inciter le salarié à choisir une rupture amiable, et a de ce fait privé sa décision de base légale.

L’arrêt de la Cour de cassation

La Cour de cassation a considéré  que « sous le couvert d’un grief non fondé de manque de base légale, le moyen [l’argumentation du salarié] ne tend qu’à contester l’appréciation souveraine par la cour d’appel de l’existence d’un vice du consentement ».

La Cour a, par ailleurs, rejeté de la même manière une autre contestation par l’employeur concernant le statut (non retenu par la cour d’appel) de cadre dirigeant du salarié,

En conséquence, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi de l’employeur (Cour de cassation, chambre sociale, 16 septembre 2015, N° : 14-13830).

Conclusion : Le vice du consentement permet de remettre en cause une rupture conventionnelle.  L’existence d’un vice du consentement relève de l’appréciation souveraine des juges du fond. En pratique, elle est peu retenu par les juridictions.

Dans cette affaire, le salarié soutenait avoir conclu une rupture conventionnelle sous la contrainte (courriers de mise en demeure, refus de congés, engagement d’une procédure de licenciement pour faute grave avec mise à pied conservatoire). Les pressions exercées par l’employeur ont été à la fois concomitante à la réflexion sur la rupture conventionnelle et particulièrement forte.

Dans ce contexte, les juges du fond ont considéré que le salarié n’avait pas d’autre alternative que de signer la rupture conventionnelle ou d’être licencié pour faute grave. Autrement dit, la pression de l’employeur a vicié le consentement du salarié.

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Sources : jurisprudence de la Cour de cassation legifrance.gouv.fr

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