La convention doit être signée des deux parties

La Cour de cassation avait déjà rappelé l’obligation de remettre au salarié un exemplaire de la convention de rupture conventionnelle dès sa signature. Dans cette affaire, la cour a dû préciser que la convention de rupture conventionnelle remise au salarié doit être signée par l’employeur. En effet, seule la remise au salarié d’un exemplaire signé des deux parties permet au salarié d’exercer son droit de rétractation en toute connaissance de cause et de demander l’homologation de la rupture conventionnelle (arrêt du 3 juillet 2019).

Le contexte de la rupture conventionnelle

Une convention de rupture a été présentée par son employeur la société Akzio à un attaché commercial junior ayant un peu plus d’un an d’ancienneté. Celui-ci a signé le document le 14 mai 2013, dont un exemplaire ne comportant pas la signature de l’employeur lui a été remis. Après un délai correspondant à un délai de rétractation, l’employeur a adressé une demande d’homologation à l’autorité administrative, qui l’a accordée.

Peu de temps après, le 15 juillet 2013, la société Akzio a été placée en liquidation judiciaire et  un mandataire liquidateur a été nommé.

Le contentieux : une convention signée du seul salarié est-elle valide ou nulle ?

Le salarié demande que la convention soit dite nulle

A la suite de la rupture de son contrat de travail, le salarié a saisi la juridiction prud’homale. Le salarié demandait que la convention soit dite nulle et que lui soit attribué l’indemnité de préavis et les congés payés sur ce dernier, ainsi que des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Dans le cadre du contentieux, le salarié a notamment exposé que la société Akzio avait usé de manœuvres frauduleuses, pour le décider à signer l’accord de rupture conventionnelle, dont il sollicite également la nullité pour dol. Selon le salarié, son employeur à l’initiative de la rupture conventionnelle la lui aurait imposée en lui présentant un formulaire pré-rempli. De plus, selon lui, il a signé le formulaire sans avoir d’information sur les conséquences de cette rupture par rapport à un licenciement économique. Et, entre autres éléments, le salarié a fait état du fait que l’employeur n’avait pas signé la convention.

Les juges de première instance et d’appel considèrent la convention valide

Le jugement du conseil de
prud’hommes, puis l’arrêt de la cour d’appel qui a  confirmé le jugement de première instance,
ont débouté le salarié de sa demande de nullité de la rupture conventionnelle.

La cour d’appel a notamment relevé :

  • que le salarié ne contestait pas avoir été informé de ses possibilités d’être assisté, ce qui lui permettait de recueillir les informations et avis nécessaires avant de prendre sa décision,
  • qu’il ne peut se prévaloir d’une absence d’entretien préalable à la signature et ainsi d’avoir été privé par son employeur de la possibilité de négocier la fin de son contrat de travail,
  • que le salarié ne démontre pas que la société Akzio aurait usé de manœuvres frauduleuses,
  • que nonobstant l’absence de la signature de l’employeur sur l’exemplaire de la rupture conventionnelle remis au salarié, celui-ci avait la possibilité d’exercer son droit de rétractation, dans les quinze jours à compter de sa propre signature du document, qui rappelle expressément l’existence de cette faculté, 
  • et « qu’à l’issue du délai de rétractation, l’employeur a adressé une demande d’homologation à l’autorité administrative d’un exemplaire de la convention de rupture, ce qui atteste formellement de son acceptation, et ce malgré l’absence de sa signature apposée sur l’exemplaire remis au salarié ».

(Arrêt de la Cour d’appel de Metz, du 4 janvier 2017).

L’affaire devant la Cour de cassation

Le pourvoi du salarié

Débouté le salarié a formé un pourvoi en cassation.

Le salarié a rappelé :

  • que l’article L. 1237-11 du code du travail précise que la rupture conventionnelle ne peut être imposée à l’une ou autre des parties et doit résulter d’une convention signée par les parties.
  • que la signature de la convention constitue une formalité substantielle et qu’en refusant d’annuler la convention litigieuse alors qu’elle avait constaté que l’exemplaire remis au salarié n’était pas signé, la cour d’appel a violé l’article L 1237-11 du code du travail.
  • que la remise d’une convention de rupture non signée au salarié n’est pas celle d’un exemplaire de la convention de rupture.
  • que le délai de rétractation ne court qu’à compter de la signature par les deux parties.
  • qu’une demande d’homologation effectuée alors que le délai de rétractation n’a pas expiré entache l’homologation d’irrégularité…

La Cour de cassation rappelle qu’une convention doit être signée des deux parties

La Cour de cassation a d’abord relevé « que pour dire valable la rupture conventionnelle, l’arrêt [de la cour d’appel] retient que nonobstant l’absence de la signature de l’employeur sur l’exemplaire de la rupture conventionnelle remis au salarié, celui-ci avait toujours la possibilité d’exercer son droit de rétractation, dans un délai de quinze jours imparti, à compter de sa propre signature de ce document qui rappelle expressément l’existence de cette faculté ».

La Cour de cassation en a conclu « Qu’en statuant ainsi, alors que seule la remise au salarié d’un exemplaire de la convention signé des deux parties lui permet de demander l’homologation de la convention et d’exercer son droit de rétractation en toute connaissance de cause, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

Par ces motifs, la Cour de cassation a cassé et annulé dans toutes ses dispositions, l’arrêt de la cour d’appel de Metz (Cour de cassation, chambre sociale, 3 juillet 2019, N° : 17-14232). 

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Conclusion :

Cette position de la Cour de cassation sonne comme le rappel d’une évidence. Celle-ci était pourtant nécessaire puisqu’un conseil de prud’hommes et une cour d’appel avaient pris une position contraire.

Une convention ne peut être valide que lorsqu’elle a reçu l’accord des parties concernées, matérialisé par leur signature. Concernant la rupture conventionnelle, c’est la signature par les deux parties (la deuxième signature si les deux ne sont pas apposées le même jour) qui fait débuter le lendemain le délai de rétractation de 15 jours et permets ensuite à la partie la plus diligente de demander l’homologation.

Article rédigé par Pierre LACREUSE, Sciences-Po Paris, licence en droit et DESS Université de Paris I Panthéon- Sorbonne, ancien Directeur de la Gestion du personnel et des Relations Sociales, DRH, puis chef d’entreprise (PME), aujourd’hui Editeur juridique et relations humaines sur internet.

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Sources : jurisprudence de la Cour de cassation Légifrance.gouv.fr ; code du travail.

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